1949. Le Croisic, un petit Finistère

1949. La campagne entoure la vieille ville blottie au bord du traict, à l’abri des tempêtes. Face à l’océan, Port Lin et ses villas anciennes côtoient quelques pavillons modernes. Les prisonniers allemands sont partis après avoir fini de déminer mais la côte est encore hérissée de casemates et de tourelles d’artillerie. Sur le port, une passerelle donne accès à une jonchère et la chambre des vases est un simple échouage. Le Croisic compte 4 000 habitants, tout comme aujourd’hui.

1-On parle breton sur les quais

Entre deux guerres, des pêcheurs du Guilvinec et de Douarnenez viennent chaque été faire la saison de la sardine au Croisic. De nombreuses familles finissent par s’y installer. On les appelle les « Gaouches », les Rouges, à cause de la couleur de leurs vareuses. Vers 1950, cette communauté bretonnante représente près de 90 % de la population active maritime. Les femmes travaillent aux conserveries et vendent leurs dentelles sur le port, vêtues de leur costume traditionnel.

2-Les sirènes rythment la vie du port

Le quartier du Lénigo est celui des conserveries. Dès le retour des bateaux, les sirènes retentissent, appellant les ouvrières au travail. Des centaines de femmes nettoient, font frire et mettent en boîte les sardines. Trois usines toutes neuves – Lefebvre, Le Bayon et Paul Chacun – sont en activité entre les années 30 et 60. La plus ancienne, Philippe & Canaud, fermera en 1974, mettant un terme à plus d’un siècle d’histoire.

3-Seul autour du monde

Le 19 septembre 1949, le Croisicais Jacques-Yves Le Toumelin quitte discrètement le port pour un tour du monde à la voile. Il est le troisième navigateur français à tenter l’aventure. Son bateau, Kurun, est un cotre de type norvégien. Il a été construit par le maître-charpentier Jean Moullec au chantier Leroux, l’un des quatre chantiers navals croisicais, rue des Coquillages. Après trois ans de mer, Kurun fera un retour triomphal et le récit de ce voyage deviendra un best-seller.

4-Le parc de Pen Avel est à l’abandon

Planté au XIX e siècle, ce parc de dix hectares entoure une des toutes premières villas de la côte. Chênes verts, lauriers, fusains et arbousiers lui donnent un air très méditérranéen. Avant guerre, cinq jardiniers s’occupent de l’entretenir. Puis le domaine est confisqué par l’armée allemande et mis en coupe pour faire du bois de chauffage. Très dégradé, il reste inutilisé jusqu’en 1952, date à laquelle il se transforme en colonie de vacances.

5-Un nom de bateau pour le cinéma

Il est magnifique avec ses trois hublots, sa façade art déco et ses petits drapeaux ! Le cinéma Le Hublot voit le jour en 1939 grâce à M. Renard, un projectionniste ambulant qui possède un bateau qui porte le même nom. Après guerre, la salle endommagée par une bombe est rénovée et ne désemplit pas. On vient y voir Le Fleuve, de Jean Renoir, ou Ben Hur, de William Wyler. À partir de 1971, le cinéma partage son nouveau bâtiment avec un supermarché, puis devient associatif.

Source: Ouest-France 26 juillet 2012